Assise dans ma chambre d'hôtel, je sors enfin mon journal. J'ai quitté Gaspé hier, et je n'ai pas osé sortir mon cahier bleu depuis que j'ai décidé de ne plus t'écrire. Tu vois, je reviens à toi. Ton visage apparaît encore de temps en temps, au détour du chemin, mais de moins en moins, Le plus difficile reste à me séparer de l’image que j’avais de nous, de moi, dans ce nous. C'est peut-être pour ça que j'ai de la misère à écrire sans te parler, comme si écrire pour moi me demandait un trop grand effort.
Il y a aussi de grands moments où je ne pense plus à toi, et je dois remercier la Gaspésie pour ce cadeau. Hier, je me suis assise en lotus sur le gazon devant la maison face à la mer. Je n'ai pas osé descendre sur la plage, j'ai eu trop peur de ne pouvoir m'en séparer. D'où j'étais, je pouvais voir la mer, les vagues, de l'autre côté la montagne et les grands pins, ça m'a suffit pour m'imprégner une dernière fois de cette paix. Sentir que j'étais là, dans le moment, juste moi, non pas à me dire que ce serait donc beau si t'étais là, mais à apprécier le beau pour moi. J'ai compris qu'à chaque fois que je m'abandonnais dans un paysage, que je levais la tête parce que je croyais reconnaître le vol d'un aigle ou d'un Fou de Bassan, ou que je baissais mon regard vers l'eau parce que cette pointe ressemblais au museau d'un phoque, j'arrivais à ne penser à rien, et que c'était dans ces moments que j'étais le plus présente.
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