C'est la faute à St-Exupéry

C'est à cause d'une envie de lire dans le bain qui m'a pris il y a quelques jours. Je m'en confesse, je ne lis plus autant qu'avant.  Manque de temps, j'écris, besoin de lunettes, trop d'ordi, pas assez de romans.  Peu importent, les raisons, toujours est-il que l'envie m'a reprise comme ça, soudainement dimanche soir, et que j'ai cherché un livre pas trop long, que je pourrais au besoin lire un peu et laisser de nouveau.


J'ai donc attrapé "Terre des Hommes" de Antoine de St-Exupéry, dans ma bibliothèque.  Et,  comme à chaque fois que je l'ai lu, il m'a donné envie d'écrire.  Je ne me rappelle pas quel a été mon premier coup de foudre de St-Ex après "Le petit prince".  J'hésite entre "Terre des hommes" et "Lettre à un otage".  Mais au fond, ça n'a pas d'importance, c'est toujours l'histoire de quelqu'un qui tente de comprendre les hommes et rêve de retourner chez-lui en suivant une étoile.  Mais on ne lit pas St-Exupéry pour l'histoire,  on le lit pour les mots, pour ces phrases qui nous restent accrochées à l'âme une éternité durant.  Comme celles-ci :

(...) Je surprenais aussi les confidences que l'on échangeait à voix basse.  Elles portaient sur les maladies, l'argent, les tristes soucis domestiques.  Elles montraient les murs de la prison terne dans laquelle ces hommes s'étaient enfermés. Et, brusquement, m'apparut le visage de la destinée.


Vieux bureaucrate, mon camarade ici présent, nul jamais ne t'as fait évader et tu n'en es point responsable. Tu as construit ta paix à force d'aveugler de ciment, comme le font les termites, tout les échappées vers la lumière. Tu t'es roulé en boule dans ta sécurité bourgeoise, tes routines, les rites étouffants de ta vie provinciale, tu as élevé cet humble rempart contre les vents et les marées et les étoiles. Tu ne veux point t'inquiéter des grands problèmes tu as eu bien assez de mal à oublier ta condition d'homme. (...)

 Je pourrais reprendre tels quels,  ces mêmes mots, écrits il y a presque 75 ans par un pilote d'avion qui prenait l'omnibus pour se rendre à son travail.   Je les mettrais discrètement dans une histoire inventée volée un petit lundi matin brumeux dans mon train de banlieue et vous pourriez en reconnaître facilement l'émotion.  

Et j'ai envie d'écrire exactement ça.  Et j'ai arrêté d'écrire, parce que je n'écrirai jamais comme ça.  Je l'avoue, je suis jalouse. J'aimerais avoir ce doigté avec les mots, cette élégance, ce rythme, cette capacité de dire des choses complexes avec des mots simples.

Alors depuis quelques jours, je lis dans mon train le matin, en rêvant de trouver des mots aussi simples et aussi forts pour vous raconter mon ordinaire.

6 commentaires:

  1. J'adore St-Exupéry, mais tes mots simples me touchent souvent.
    Les siens dans la forme, font parfois monter l'ennui, parfois trop de fioritures bien perlées allourdissent le propos. Pour moi du moins. Évidemment, pas dans le petit prince... Ça c'est dur à accoter.

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  2. Malgré mon énorme consommation de livres, de St-Ex, je n'ai lu que Le Petit Prince. Ça donne envie d'aller explorer plus loin.

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  3. @Impulsive montréalaise, je l'avais lu au CEGEP, et n'en avais pas apprécié toute la beauté. Terre des Hommes, un petit livre de rien du tout, m'étonne par sa simplicité et, je suis vraiment étonnée par la modernité du propos, dont on pourrait reprendre des pans entiers et appliquer à notre contexte.

    @ Elaine, Quand même contente de savoir qu'à tes yeux, je me situe quelquepart entre "Le Petit Prince" et "Terre des Hommes" ;)

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  4. Personnellement, je trouve que tu réussis pas mal à faire de l'extra avec ton, comme tu le dis, "ordinaire"! Ce qui fait de tes écrits des récits extraordinaires ;)

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  5. Je suis un peu en retard dans mon commentaire, (vaut mieux tard que jamais!...)
    Tu vois, moi je trouve qu'il y a une ressemblance. Quand j'aime lire quelqu'un, s'est prèsque toujours parce que je peux le comparer à une rivière: il y a un flot, une direction et rien n'accroche en grinçant, tout coule même s'il y a des torrents, des rochers à contourner, des remous ou de l'eau tranquille. Ce n'est jamais banal car on y est suspendu. Et la petitesse des textes ( mais pas des histoires...car elles ont la profondeur d'un océan) nous laisse sur une envie de lire tout un livre
    Katia

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