L'homme qui marchait la nuit

Il était sorti marcher.  Malgré la pluie.  Ou peut-être à cause de la pluie.  Pour que le bruit constant des gouttes sur le trottoir, le bruit des gouttes sur les toits, effacent les mots qui courraient dans sa tête. Trop d’électricité peut-être, ou cette chaleur humide qui ne tombait pas malgré la pluie.  Peu importe, il n’arrivait pas à dormir.  Il était sorti marcher. Pour que le rythme de ses pas l’abrutisse, et apporte la paix d’esprit dont il avait besoin pour s’endormir.


Il aurait pu apporter le chien, l’utiliser comme prétexte pour la promenade.  De nos jours, un homme qui marche seul, la nuit dans une banlieue cossue, éveille des soupçons.  Mais il n’avait pas osé, l’animal était profondément endormi au pied du lit lorsqu’il s’était levé et ne l’avait gratifié que d’un vague regard.

Tapie sur mon balcon, moi aussi victime d’insomnie, je l’ai regardé passer.   Étrange fantôme de la nuit. Il marchait lentement, s’arrêtait pour penser, repartait.  Je voyais presque ses idées tourner dans sa tête comme autant de bulles de savon qui éclataient et se formaient de nouveau. 

Et puis, quelques pas derrière, une femme est apparue, l’a pris par la main, lui a chuchoté quelques mots à l’oreille. Il a souri, il a répondu  « Tu as raison », et ils ont repris le chemin, main dans la main, comme des gens en ballade, et sont rentrés chez-eux, dormir.  Ensemble.

2 commentaires: