Il aimait la musique (2)

Suite de Il aimait la musique (1)

Et un soir, assis  avec un paquet de biscuit Oreo, pendant que sa mère, remplissait son verre de lait chaque fois qu'il le vidait, Sébastien s'était mis à parler. Doucement, comme une cascade qui était devenu torrent.

Il avait d'abord avoué que que la fille n'en était pas une, qu'il s'appelait Steve.  Ben oui, il le savait, elle se fichait qu'il aime les filles ou les garçons et qu'elle était un peu contente, d'être la seule femme de sa vie, qu'elle avait envie de connaître Steve.  Mais ce n'était pas pour ça qu'il n'en avait pas parlé.  C'était parce qu'il voulait garder un jardin secret et savait que sa mère aurait voulu se montrer "cool", ouverte d'esprit et aurait posé des questions, l'air de rien, l'air intéressée pour qu'il soit bien certain que ça n'avait pas d'importance qu'il pouvait aimer qui il voulait, mais à force de questions,  il aurait été obliger de se confier, et de parler. Trop.  Et il aurait fini par avouer les vraies raisons de sa fuite.

"J'avais peur que tu brises mon rêve", avait-il avoué.  "Briser ton rêve? Mais comment? Je n'ai jamais voulu que ton bonheur".  Bien sûr elle n'avait voulu que son bonheur, mais un bonheur comme elle se l'imaginait.  Des études universitaires, un emploi stable, une jolie maison avec une clôture blanche et des enfants blonds. Son rêve à lui n'était pas aussi précis, mais il sentait qu'il avait besoin d'espaces pour grandir et se définir.  Ce n'est pas seulement Steve qu'il avait suivi, c'est la liberté qu'il promettait.

Il lui avait raconté les petites victoires et les grands échecs, le besoin de dormir dans un vrai lit, les défis, pour manger, dormir, avoir un toit chaud. Il avait eu faim et froid, et avait dû travailler pour gagner son pain.  Des petites jobines de merde, pour 3 sous, pour pas grand chose, pour des employeurs, qui le traitaient comme un moins que rien,  pour ceux qui lui offraient à manger et prenaient le temps de lui parler un peu.  

Il avait parlé de la rue, de l'incroyable solidarité des gens qu'il avait côtoyés et des malheurs plus grands que le sien qu'il avait découverts.    Il avait suivi Steve et l'avait perdu. Mais il avait trouvé la musique.
Il lui avait raconté comment il était allé là-bas, pour se chercher et plutôt que de se trouver, il avait trouvé une piste qui mène à soi-même.   Et que cette piste encore mal dessinée, passait par la musique, les notes, et que c'est ça qui lui avait donné envie de revenir chez-lui.  Il avait voulu rejeter sa mère mais s'était aperçu qu'aller vers la musique c'était aller vers elle, vers ce qu'elle aurait aimé avoir, mais par un chemin différent que celui qu'elle suggérait.

Et, quand le dernier biscuit avait été mangé, que le lait s'était tarit, il avait dit simplement: Merci,  Maman.  Elle avait ramassé son verre l'avait regardé et l'avait trouvé beau avec ses yeux verts, ses cheveux longs et son air de bohème et, elle avait versé une larme.

 Et, dans le train qui l'amenait réaliser son nouveau rêve, il comprenait finalement, ce qu'elle avait fait pour lui.

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