Une amitié comme un naufrage (2)

Ceci est la suite de Une amitié comme un naufrage (1)

La soirée s’était déroulée comme des dizaines de soirées du genre, dans un restaurant choisi par Sylvie, clinquant, de ceux qu'on croit à la mode parce que la musique y est bruyante, les serveurs tutoient les clients et le menu propose des plats avec des noms en langue étrangère.



Elles s'étaient embrassées, s'étaient dit qu'elles n'avaient pas changées.  Sylvie avait commandé un verre de vin blanc, et un autre, jusqu'à boire la bouteille, et, entre la soupe du jour et l'escalope de veau, elle avait montré les nouvelles bottes et la veste que Gérard venait de lui acheter.


Ah! Gérard! Un homme fort, un producteur de disques qui, certainement, la rendrait célèbre, la sortirait de sa job de serveuse, qui était, évidemment, temporaire.   Il lui faisait l’amour comme un dieu.  Partout,  tout le temps, ne pouvait se lasser du corps encore ferme de Sylvie, qui à 48 ans faisait encore tourner les têtes.

Madeleine, avait parlé de la petite maison de banlieue qu’elle rénovait avec François, de son travail qui la remplissait de fierté, de la promotion qu’elle espérait. Du petit dernier qui venait d’être accepté dans une excellente école, où ses deux ainés allaient déjà. De son bonheur facile.

Madeleine, à s'entendre raconter sa vie, s'était dit que des deux, c'était elle qui était la plus heureuse.  Sans flaflas, sans glamour, mais son petit bonheur à elle.  Magnanime elle avait pris la facture, en disant, « C’est moi qui t’invite.  Tu paieras quand t’auras ton gros contrat de disque. »  Elles s’étaient levées de table, s’étaient embrassées, avaient menti, pour la forme:  « Ça faisait trop longtemps, faudrait qu’on fasse ça plus souvent. »  Avant de se quitter, Sylvie porté le coup de grâce : « Madeleine ! C’est bien toi ça !  T’as tâché ta jupe avec la sauce de ton agneau » 

Et Madeleine était aller pleurer dans les toilettes.

6 commentaires:

  1. Pauvre Madeleine. Je ne crois pas que cette "amitié" lui convienne...elles sont si différentes...

    J'ai entretenu quelque chose du genre il y a quelques années, jusqu'à ce que je m'aperçoive que cette amitié n'en était plus une. J'ai fait du ménage et m'en porte mieux maintenant. Plus de soupers où je dois aller à reculons...

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  2. Deux femmes blessées qui continuent de s'écorcher. Ça me rends triste cette histoire.

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  3. Triste, mais trop souvent réaliste...

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  4. Je trouve aussi cette histoire triste mais ô combien vraie... tu décris bien des sentiments et réactions qui nous habitent malheureusement un peu trop souvent...

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  5. Hummm... Ça me rappelle moi à une certaine époque... J'adore tes textes!!

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  6. @Michèle, c'est vrai qu'en vieillissant on apprend à mieux choisir ses amitiés.
    @Fée des bois, Chantal, vous avez bien raison, c'est assez triste comme histoire.
    @Nathalie, bienvenue par ici, j'espère que tu repasseras.
    @Cora,j'espère que tu as pris les moyens pour changer.

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