De l'eau pour les poules

Cette histoire est la suite de Un soir d'été à Saint-Quelquechose

C’est la chaleur qui avait réveillée Élise.  Elle  était restée, nue dans les draps fleuris, à écouter les cigales et s’était mise à penser aux poules. Un vent léger entrait par la fenêtre et la caressait doucement. La chaleur, ici dans le calme à la campagne, n’était pas accablante comme en ville. Malgré tout, elle s’inquiétait pour les poules.


La journée avait été chaude, elle était restée dans le hamac, protégée du soleil par le feuillage de l’érable. Un vent léger passait au-dessus du ruisseau et venait la rafraîchir. Elle avait ouvert son livre et s’était endormie profondément après 2 pages. Elle avait dormi longtemps, de ce sommeil lourd et sans rêves qui la prenait depuis qu’elle était ici. Elle s’était réveillée comme saoule, alors que le soleil baissait à l’horizon et était entrée dans la maison jaune et avait oublié de donner à manger et à boire aux poules.

Elle se demandait si les poules avaient assez d’eau, si elles seraient incommodées par la chaleur. Depuis un mois, qu’elle était arrivée ici, elle passait ses journées à dormir. Plusieurs fois, il lui était arrivé d’oublier de nourrir les poules, pourtant, elles l’accueillaient toujours avec le même enthousiasme quand elle venait chercher des œufs et apporter à boire et à manger. Mais avec cette chaleur, elle craignait pour leur santé.

Demain, elle préparerait un pique-nique, un sandwich au jambon, une bouteille d’eau fraîche et quelques fraises achetées au village. Elle se laisserait couler doucement jusqu’à la crique où elle étalerait une couverture, s’étendrait sur le dos pour regarder le ciel et les quelques nuages qui passeraient. Quand elle aurait trop chaud, elle s’assoirait les pieds dans l’eau, peut-être même qu’elle marcherait pieds nus sur les roches glissantes, jusqu’à la source, où elle s’éclabousserait le visage et les bras en buvant cette eau rafraîchissante. Peut-être que demain, elle arriverait à passer une journée sans tomber morte de sommeil.

En ville, les gens étouffaient. Les journaux qu’elle avait lus en ligne parlaient de la canicule, des piscines bondées, des vieillards qui se déshydrataient, des gens qui couraient l’air climatisé des cinémas et des centres commerciaux.

Elle s’était soudain rappelé les pots en terre cuite et les géraniums rouges sur le balcon de sa voisine en ville, une vieille dame pas plus grande qu’une enfant. Dans la nuit silencieuse de la maison jaune, Elise s'était demandé  si la vieille dame souffrait de la chaleur, s’il y avait quelqu’un pour s’occuper d’elle dans cette canicule. Le rideau de dentelle de sa fenêtre avait bougé légèrement, sous la poussée du vent. Elle réalisait soudain qu’elle ne connaissait même pas le nom de cette femme qu’elle croisait presque tous les jours depuis 8 sans lui offrir plus qu’un hochement de tête.

Sa peau était collante de chaleur, elle imaginait la chaleur moite et suffocante de la ville, et la vieille qui mourrait peut-être seule dans la nuit dans son appartement mal climatisé. Pourtant, ce n’était pas la première vague de chaleur à Montréal. Elle devait bien avoir quelqu’un qui venait la voir les années passées. Quelqu’un qui en prenait soin, puisqu’elle continuait d’être là, tous les jours, balayant son balcon et la saluant.

Demain, elle se lèverait tôt, elle irait voir les poules avant de déjeuner, elle apporterait une bouteille d’eau fraîche, et les ferait boire, puis nettoierait le poulailler, avant de venir prendre son petit-déjeuner, peut-être que ça l’empêcherait de dormir.

La suite à venir sous peu...

3 commentaires:

  1. Une très belle histoire de circonstance avec cette chaleur matinale...

    Moi, c'est ce matin que je prépare des sandwichs au jambon et des fraises pour un pique nique!

    Bon vendredi.

    RépondreSupprimer
  2. ¨¨Toujours moi¨¨14 juillet 2012 à 10:03

    J'espère que quelqu'un ira aussi voir la vieille dame; ces vieilles dames que j'ai tant aimées et qui ont façonné toutes nos vies.

    RépondreSupprimer
  3. Je suis accro aux histoires d'Élise... celle-ci est particulièrement bien réussi, Sophie! Merci!

    RépondreSupprimer