Tsé des fois la vie....

J’allais intituler cet article « Des fois, j’aimerais ça être un gars ».    Mais la vie, ouin,  la vie des fois, nous envoie des petites leçons.  Je vous explique. Je suis une nouvelle adepte de course.  Vers la fin de l’été passé, j’ai atteint quelques fois 5 km, mais pas assez pour que ça devienne une habitude, je m’étais promis que cette année je l’atteindrais au début de l’été.

D’ailleurs, très tôt au printemps, je flirtais avec des distances de 4,5km, 4,6 km.   Fière de mes prouesses, je me suis donnée il y a quelques jours, l’objectif d’atteindre à la fois 5 km et d’améliorer mon temps.  Grosse erreur de débutante: je suis partie trop vite, j’ai du marcher des grands bouts et  je suis revenue à la maison rouge comme une tomate.  La course venait de m’offrir autre leçon de vie.  Rien ne sert d’améliorer la distance et la vitesse en même temps, dans la vie, vaut mieux améliorer une seule chose à la fois. Malgré tout, j’avais atteint le 5 km.

J’étais bien décidée à refaire l’expérience plus doucement et dans le plaisir.  Mais vous savez ce que c’est, semaine hyper occupée, météo merdique, ce n’est que dimanche dernier vers 6:30 du soir que j’ai enfin pu enfiler mes chaussure de course.  Dehors, j’ai été récompensée de ma patience, un magnifique soleil et le climat idéal s’offraient à moi.  Je me suis dit que l’occasion était parfaite pour faire mon 5km dans le bonheur.  J’ai donc enfourché ma bicyclette et  me suis rendue au Parc Jean-Drapeau qui se trouve à une dizaine de minutes de ma maison.  

Arrivée sur place, les feuilles des arbres brillaient d’un vert tendre, encore fripées après la pluie, comme la princesse au petit pois qui s’éveille en bougonnant mais reste si adorable malgré la mauvaise nuit.    Les oiseaux chantaient à tue-tête, la vue sur le Fleuve était époustouflante, mis à part quelques rares cyclistes, j’étais presque seule dans cet Eden.

J’ai pédalé jusqu’au pied du pont de la Concorde où j’ai attaché ma bicyclette.  Puis je me suis adossée à l’un des piliers du pont pour programmer mon téléphone, histoire d’enregistrer cette course pour la postérité.  Un homme est passé, à côté, il a attaché sa bicyclette près de la mienne, je l’ai suivi du regard, un autre, m’a dépassé,  en marchant se dirigeant là où j’allais commencer ma course. Je me suis lancée, en vérifiant derrière si l’homme à la bicyclette était sorti des toilettes, puis devant pour voir où étant rendu celui qui était passé en marchant.  Puis, un autre homme est passé dans une autre direction et je me suis retournée pour voir où il allait. 

J’ai compris que je n’aurais pas ma course dans le plaisir.   J’étais la seule femme dans un lieu quasi-désert,  où il n’y avait que quelques hommes seuls,  je ne connais pas très bien les pistes de l'Ile Notre-Dame et le soleil allait se coucher dans un heure. 

Si j’étais un gars, je serai allée courir dans le parc sans me poser de question, mais je suis une femme, et dans ma tête, il y avait les voix.  Suis-je la seule, à les entendre ?  Celle du policier « Qu’est-ce que vous faisiez toute seule, Madame, dans un endroit désert un dimanche à 7 heures le soir ? » , de mes proches, « Ben voyons, qu’est-ce que t’as pensé »,  la voix de mon chum « Pourquoi tu m’as pas demandé d’aller avec toi ? ».   Bref, j’ai ragé, je me suis dit, que j’aurais voulu être un homme et je suis remontée sur ma bicyclette. 

J’ai roulé plus loin, vers le Vieux-Port, me disant qu’il y aurait du monde, et que je pourrais peut-être courir 15-20 minutes,  que tout n’était pas perdu.  J’ai abouti sur le bord du Canal Lachine.  Le soleil était encore chaud,  il y avait des pêcheurs, des familles, des joggeurs, des gens qui promenaient leur chien.  L’endroit était sauf.

Pour une deuxième fois, j’ai attaché ma bicyclette.  Puis je suis partie, doucement, pour le plaisir, en regardant les gens, les reflets du soleil sur l’eau du canal, la ville brillait sur sa montagne et j’ai couru, couru, couru.  Doucement, à mon rythme.  Je me suis arrêté quand mon Iphone. indiquait 5.1 km. Parce que. Parce que je me suis dit que c’était pas parce j’étais une fille que je n’y avait pas droit à mon 5km. Parce que.

C’est avec le sourire fendu jusqu’aux oreilles que j’ai repris le chemin de la maison, me dépêchant un peu parce que le soleil commençait à baisser et que je ne voulais pas traverser l'ile Notre-Dame à la noirceur. Sur le chemin du retour, mon cellulaire a sonné :
-       Allo ?
-       C’est moi, je voulais juste savoir si tu es correcte, ça fait longtemps que t’es partie.
-       Tout va bien je suis à la maison dans 15 minutes.

Ma fille a 14 ans, elle devine déjà, sans trop savoir pourquoi que lorsqu’une femme seule partie à 6 :30 courir n’est pas rentrée à 7 :30, il faut s’inquiéter, un peu.

J'ai repris la route. L’Ile Notre-Dame était aussi vide qu’une heure plus tôt et dans le soleil couchant, ressemblait encore plus au Paradis Terrestre.  Soudain, entre les branches d’un buisson, près d’un parterre de fleurs et à quelques pas du pavillon de la Jamaïque, je l’ai vu.  Un magnifique renard roux, qui profitait de la solitude des lieux, pour gambader un peu. Il m’a souri, m’a fait un clin d’œil et est reparti comme il était revenu. 

Je suis rentrée à la maison, pleine d’énergie, heureuse et me sentant comme une Iron Woman.   Vérification faite sur Google Map , j’ai couru 5,1 km ET pédalé 16 km.  Le niveau débutant d’un triathlon est à 5 km de course, 20 km de bicyclette, et 750 m de nage.  Je commence quasiment à me dire que je pourrais m’y inscrire.


À bien y penser, le titre de cet article aurait pu être « Parce que je suis une femme, dimanche passé, j’ai couru 5,1 km, pédalé 16km, j’ai vu un renard  dans le soleil couchant et j’ai sur que ma fille m’aimait.  Tsé des fois la vie…

4 commentaires:

  1. Ahahahaah ! Moi je serais allée courir quand même ! Je suis frivole (et j'ai pas le gène peureuse/prudente) comme ça ! Aaaaah! le plaisir de courir !

    On s'inscrit à un 10 km ensemble ? :P

    Je sais pas pourquoi, mais je ne suis pas encore inscrite à aucune course. J'ai comme un p'tit stress. Même si je sais que je suis capable. Soupir. C'est p-être là ma peur à moi.

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    1. Impulsive, je suis inscrite à ma première course, dimanche prochaine "Color Me Rad", 5 km de fun. Une des raisons pour laquelle je voulais arriver à 5 km, c'est que je voulais que cette course soit plus de fun que de souffrance. Je ne sais pas si un jour je vais m'inscrire à un vrai marathon, pas encore prête psychologiquement en sauter dans cette mode. Mais bon, après dimanche j'évaluerais peut-être de nouveau.

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  2. J'aime ton histoire...je suis du genre à me faire de telles histoires, des peurs!...
    J'ai fait mon premier 10 km dans un marathon dans ma ville ce weekend. J'ai bien aimé. La musique, la température (pas trop chaud, assez frais même) et la forme étaient au rendez-vous.

    Bravo à toi et bonne course au Color me rad!

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  3. Félicitations pour tous ces exploits! La finale du texte est bien jolie et positive.

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